Derrière le blason de Serpentard

Le lendemain

Après le cours de métamorphose

Jacen arriva devant le blason de Serpentard, plongé dans ses pensées.

Il était plutôt content qu'Alzaëlle se soit si vite remise de ses blessures, qu'elles soient intérieures, où extérieures...

Puis il se rapella qu'il ne connaissait pas le mot de passe.

*Mince... comment je fais pour y aller, maintenant

Alzaëlle entra dans la Salle Commune, l'air beaucoup plus enjouée que quelques heures auparavant.

Beaucoup plus arrogante aussi.

Il n'y avait personne... Sauf Jacen. Le jeune garçon se tenait devant le blason de Serpentard et Alzaëlle en déduisit donc qu'il souhaitait se rendre dans le passage qui se trouvait juste derrière.

Elle s'approcha de lui puis annonça, un léger sourire sur le visage:

"Serviteur des Ténèbres"

Aussitôt, le passage apparut derrière le blason.

La jeune fille se tourna vers son camarade puis lui annonça:

"Plutôt significatif comme mot de passe, non?"

Jacen fut surpris par la voix d'Alzaëlle.

Il ne s'atendait pas à la trouver là, mais en tout cas, elle venait d'ouvrir le passage. Il était logique qu'elle soit la seule à connaitre le mot de passe... Mais maintenants, ils étaient deux.

«Oui, c'est très... explicite. Merci quand même. Je comptais y faire un tour afin de trouver de nouveaux objets. Des objets que je n'aurais pas remarqué la dernière fois...»

Un sourire s'affichait à nouveau sur le visage de la jeune serpentard. Elle semblait prête à faire souffrir tout Poudlard... au grand désespoir de ces derniers.

«Tu peux venir si tu veux, mais de toute façon, je vais juste regarder ce qu'il y a plus en détail. Ca risque de t'ennuyer... Mais fais comme tu en a envie !»

Sur ces mots, Jacen franchit l'entrée du passage et descendit lentement jusqu'à la grande salle secrète. Des chandeliers en argent illuminèrent les murs dès qu'il y entra.


Jacen commença à chercher divers artefacts plus où moins intéréssants, qui pourraient lui servir au cours de son séjour à Poudlard.

La plupart d'entre eux étaient impregnés de magie noire, et les sortir de cette pièce serait dangereux : ils étaient bien trop facile à repérer. Mais d'autres l'étaient moins. Il s'agissait souvent de fioles, d'ouvrages anciens, et plusieurs autres très amusants.

Il commençait à lire les étiquettes d'une rangée de fiole, lorsque les bruits de pas d'Alzaëlle se firent entendre derrière lui, et elle sortit de l'ombre d'une façon presque paranormale. Vraiment, elle avait le chic pour effrayer les autres...

Ca lui donna presque envie de rire.

Alzaëlle avait décidé de suivre Jacen. Ce qu'il voulait faire des objets qui se trouvaient derrière ce blason l'intriguait.

Bien sûr, elle savait que c'était pour faire souffrir les autres, incommensurablement.

Jacen avait changé.

Il était devenu comme elle.

Mais Alzaëlle aussi avait changé, c'était humanisé.

Mais personne n'en saurait jamais rien.

Jamais.

Cette nouvelle humanité ouvrait la porte à tant de nouvelles perspectives que la jeune fille ne pouvait qu'en être effrayée. La faiblesse lui tendait les bras, prête à l'étreindre déjà.

Mais Alzaëlle était bien décidée à ne pas se laisser faire, à garder cette attitude si détestable qui était la sienne même si intérieurement, elle n'était plus la même petite enfant capricieuse.

Elle arriva enfin dans la salle, à la manière d'un serpent qui glisse sur le sol. Quoi de plus normal après tout?

Ses yeux sombres balayèrent les divers objets qui se trouvaient dans la pièce et, machinalement, ses longs doigts arachnéens se promenèrent sur diverses fioles dont le contenu était plus qu'affolant.

Pour les autres.

Jacen se replongea dans la lecture des étiquettes des différentes éprouvettes. Il en remarqua une de très intéréssante, on pouvait y lire :

Potion Vormiita. Effet : provoque de violentes nausées et vomissements. Durée : 1 jour de douleur par goutte. Les effets se font ressentir quelques minutes après l'absorption de la potion. Peut se diluer dans tous les liquides.

Jacen attrapa la fiole d'un air satisfait, et se retourna vers Alzaëlle.

«J'ai trouvé de quoi rafraichir nos amis des autres maisons. Regarde.»

Il s'approcha et lui fit lire l'étiquette.

Vivement le prochain repas ! Ca promettait d'être divertissant.

Alzaëlle aussi semblait apprécier l'idée. Il lui sourit, content d'avoir visé juste.

«On pourrais aller verser ça directement dans les plats, en cuisine... Où alors, on prends juste quelques aliments, que l'on assaisonne...»

Ensuite, ça irait tout seul...

Alzaëlle déchiffra rapidement l'étiquette et un léger sourire s'afficha sur son visage diaphane au fur et à mesure que Jacen énonçait le plan qu'il comptait mettre en oeuvre pour nuire aux autres élèves.

La jeune fille hocha la tête, en signe d'assentiment.

"Oui, ça promet d'être amusant. On vise une table ou une personne en particulier ou bien on se contente de faire cela au hasard?"

Le hasard pouvait avoir de bons côtés, Alzaëlle le savait depuis peu même si elle lui préférait encore - et de beaucoup - tout ce qui semblait tracé, net.

D'ailleurs, jamais la vie de la famille Heardarken - mise à part la chute de Voldemort à cause du jeune Potter il y avait de cela plus de 25 ans - n'avait connu d'imprévus.

Ils naissaient, vivaient et agrandissaient plus encore le prestige de leur famille.

Tel était le destin de tous les Heardarken.

«Je vise beaucoups trop de monde... le plus simple serais de laisser agir le hasard, effectivement.»

Jacen plaça la fiole dans son sac. Il se dirigea à nouveau vers les étagères, le regard parcourant leur contenu.

«Je vais voir si je ne peux pas trouver autre chose, au cas où...»

Il se dirigea vers une grande armoire noire, d'environ deux mètres de haut, qui renfermais sûrement quelque objet intéréssant. Il essaya de l'ouvrir.

Sans succès.

La serrure était bloquée.

Reculant de quelques pas, il saisit sa baguette et prononça :

«Alohomora !»

Rien ne se passa.

Contrarié, Jacen se dirigea vers une autre étagère, y attrapa une fiole qu'il avait déja repérée et la lanca violament contre la serrure.

La fiole explosa, répandant un liquide jaune-orangé sur l'armoire. La serrure commenca alors à fondre, une partie des battants de l'armoire se liquéfia.

«Elle doit contenir des choses intéréssantes, pour être aussi bien protégée...»

Il s'avanca vers la grande armoire, et l'ouvrit d'un coup sec.

Jacen demeura un instant interdit, découvrant ce qui se trouvait dans l'armoire.

Puis il tomba à genoux, la tête plongée entre les mains.

Il ricanais. Petit à petit, les secousses de rires se transformèrent en sanglots, puis en pleurs.

C'était trop dur.

Vraiment trop.

Les souvenirs relègués dans un coin de son esprit remontaient à la surface, comme une vague déferlante, impossible à arrêter.

Sa famille. Ses anniversaires. Les vacances avec ses parents. Le jour où il reçu l'Eclair de feu IV. Et d'autres. Encore, et encore, trop nombreux.

Les larmes ne cessaient de couler, la douleur des souvenirs le transperçaient comme autant d'épées effilées.

Alzaëlle resta un instant interdite devant le contenu de l'armoire.

Baguettes magiques, trophées, livres, atrefacts en tous genres appartenant visiblement à de véritables Mangemorts faisaient face aux deux élèves.

Puis un ricanement.

C'était Jacen.

Le jeune garçon semblait en proie à une crise étrange quand Alzaëlle se souvint que ses parents avaient été tué par... Des Mangemorts, précisément.

Après la déferlante d'évènements qui s'étaient succédés, la jeune fille avait presque oublié cela.

Elle avait presque oublié que les parents de Jacen étaient des traîtres.

A cet instant, elle hésita.

Que faire?

Le laisser là, le considérer comme un ennemi à cause de ses parents?

Les traits de la jeune fille se contractèrent légèrement. Que ferait une Heardarken, une véritable Heardarken?

La réponse était toute trouvée.

Mais Alzaëlle... Que devait-elle faire?

La jeune fille s'approcha de son camarade qui sanglotait et s'agenouilla face à lui, en lui posant une main sur l'épaule.

Ces gestes, pourtant simples, lui coûtaient énormément.

Elle avait eu le choix entre deux extrémités et finalement, elle avait choisit celle qu'elle haïssait le plus, qui lui faisait reconnaître qu'elle avait changé.

Elle aurait voulu crier, hurler contre ce nom, contre ce monde.

Finalement, elle s'était dit que même si les parents de Jacen avaient été les pires des idiots, lui n'en avait rien su et que s'il avait été envoyé à Serpentard, c'était qu'obligatoirement, il était digne de la maison des serpents.

Toujours la sacro-sainte Serpentard.

Alzaëlle ne prononça pas un mot. Sa gorge était trop serrée, son esprit trop embrumé de pensées contradictoires et confuses.

Jacen sentit le contact d'une main sur son épaule. Alzaëlle.

Il n'y réagit même pas.

La douleur était si forte que tout autre stimuli ne l'atteignait pas. Il était plongé dans un abîme de souffrances. Et il ne parvenait pas à remonter.

Il repensa à tout ce qui lui était arrivé hier. Il était évident qu'il n'aurais pas pu tenir avec une telle pression sur le coeur, pas plus longtemps que ça. Et là, il explosait. Dans un silence effrayant.

Jacen resta ainsi pendant quelques minutes à laisser défiler les douloureux souvenirs qui lui déchiraient l'âme sans pour autant laisser son corps en reste. La douleur commença à s'estomper, très lentement, trop lentement. Ses sens refesaient surface, ses nerfs palpaient à présent la douleur physique de ses muscles tendus.

Il remarqua soudain qu'Alzaëlle n'avait pas bougée pendant ces longues minutes. Comment pouvait-elle se montrer aussi compatissante envers lui ? Alors qu'il était effondré, à même le sol ?

Jacen regretta alors qu'elle aie été là au terrain de Quiddich. Il lui aurait ainsi épargné ce changement et la détestable Heardarken serais restée la détestable Heardarken.

Mais non. Elle avait été là.

Et ça, il ne pouvais le changer. Il fallais donc vivre...

Lentement, Jacen posa les mains à terre et releva sa tête pour regarder Alzaëlle. Il voyait flou, tellement ses yeux étaient embués de larmes.

Vraiment, il devait faire pitié à voir. Mais il s'en moquait. C'était Alzaëlle, et pas n'importe quelle autre personne.

De longues minutes s'étaient écoulées.

Alzaëlle n'avait pas bougé, pas parlé.

Seule la légère pression qu'elle administrait sur l'épaule de Jacen montrait qu'elle était là, que ça n'était pas une statue qui faisait face au jeune garçon.

La jeune fille regardait tristement son camarade, se demandant toujours si elle avait fait le bon choix, s'il n'aurait pas mieux valu qu'elle le laisse seul avec sa douleur, qu'elle le laisse mourir de tristesse, tout comme ses parents étaient morts à cause de la bêtise qui les avait fait choisir le camp des faibles.

Lorsqu'il releva la tête vers elle, Alzaëlle aurait voulu sourire, pour lui apporter un peu de réconfort peut-être.

Mais elle n'y arrivait pas.

Non, même ce petit sourire sarcastique qui la caractérisait si bien ne voulait pas apparaître sur son visage à cet instant.

Il restait grave, trop froid pour une enfant, assurément.

Pour une enfant normale en tous cas.

Mais Alzaëlle n'entrait pas et n'entrerait jamais dans ce cadre de la normalité.

Jamais.

Elle observa Jacen. Son camarade avait les yeux encore embués de larmes, tout comme ceux d'Alzaëlle avaient pu l'être ce matin-là.

La jeune fille se rappela alors que lui, il n'avait pas hésité à la consoler, à lui apporter un peu plus de réconfort qu'une simple main posée sur une épaule.

Simplement, elle se savait incapable de plus, tellement elle était emmêlée dans le flot de pensées qui l'assayaient, hésitant encore, se demandant si elle ne trahissait pas son sang en faisant cela, en apportant du réconfort au fils de traîtres au Seigneur des Ténèbres.

Mais elle ne devait plus penser aux parents de Jacen.

Non, ils étaient morts, ils avaient payé.

Sans doute même étaient-ce des amis des parents d'Alzaëlle qui les avaient exécutés.

Mais la jeune fille préférait éviter d'y penser.

Ne plus penser.

Elle brisa alors le silence, parce-que c'était nécessaire, parce-que sinon, les deux Serpentard finiraient engloutis par un océan de choses désagréables auxquelles Alzaëlle ne voulait pas faire face.

"Ca va aller?"

Une phrase fade, presque trop tranchante.

Mais encore une fois, elle ne pouvait pas plus.

Jacen essuya ses larmes du revers de la manche, et observa Alzaëlle de façon plus nette.

Elle venait de lui demander s’il allait bien.

S’il allait bien...

Drôle de question.

C'est une chose qui aurais du l'irriter. Mais il n'en était rien. Elle essayait de s'assurer qu'il se portait correctement. Il n'y avais aucune doute là-dessus.

Elle essayait d'être gentille... Malgré son éducation. Ca dépassait son entendement. La grande Heardarken...

Et elle restait là, à quelques dizaines de centimètres de lui, à lui apporter son soutient.

Changée...

Le visage de la jeune fille n'étais plus aussi impassible qu'avant. Celui de Jacen non plus. Elle devait pouvoir lire, rien que dans ses yeux, ses moindres sentiments. Un vrai livre ouvert...

Il leva sa main droite et tendit le bras vers ce visage si pâle qu'il avait en face de lui. Un visage d'ange, quoique l'on puisse dire.

*A quoi bon lui cacher plus longtemps, elle finira par s'en rendre compte...*

Des souvenirs de ces dernières 24 heures lui revinrent en tête comme des flashs. Mais pas des souvenirs de douleur, de mort. Des souvenirs de bonheur. De calme.

L'étreinte si chaleureuse... les lèvres si douces de la jeune fille...

Jacen s'approcha lentement d'Alzaëlle, sa main délicatement posée sur la joue de la jeune fille. Une peau si douce.

A quelques centimètres du visage de la jeune fille, il hésita. Une fraction de seconde seulement, car il avait compris une chose : conserver ses sentiments était trop douloureux.

Jacen franchit les derniers millimètres qui le séparait d'Alzaëlle, et l'embrassa avec passion. La douce chaleur de la jeune fille imprégna ses lèvres, son visage, son être.

Il ne pensait plus à rien d'autre qu'à elle.

Les yeux d'encre d'Alzaëlle étaient plongés dans ceux de Jacen lorsque soudainement, elle cru y déceler quelque chose d'étrange... D'effrayant.

Puis, les doigts de son camarade sur sa joue.

La peur.

La situation lui échappait, elle ne contrôlait plus rien.

Elle n'eut même pas le temps de se reculer que déjà, il était trop tard. L'action avait paru se dérouler au ralenti mais il n'y avait déjà plus rien à faire pour l'arrêter.

La chaleur, le goût des lèvres de Jacen contre les siennes.

Le coeur d'Alzaëlle cogna terriblement fort dans sa poitrine, comme s'il venait de se réveiller, après plusieurs années d'un sommeil trop long.

Elle avait un coeur.

Ca aussi, elle l'avait presque oublié.

Quelques instants, la jeune fille voulu résister, repousser Jacen et l'océan de sentiments qui la submergeait.

Mais qu'est-ce qui se passait? Pourquoi son camarade agissait ainsi? Pourquoi cela devait-il se passer de cette manière? Pourquoi n'avait-elle pas la force de se dégager de son étreinte? Pour...

Elle tremblait.

Très légèrement, imperceptiblement presque, mais elle tremblait.

Ce qu'elle ressentait était trop fort pour être traduit par de simples mots. C'était trop confus, trop fort, trop difficile à supporter pour une gamine qui avait toujours eu tout ce qu'elle voulait sans s'apercevoir que ce qui lui manquait réellement, c'était de l'affection, de la véritable affection.

Adieu la détestable Alzaëlle, adieu l'enfant des Heardarken.

La jeune fille ne tenta rien, ramena même ses bras contre la silhouette de Jacen. Elle ferma les yeux que la surprise avaient laissé grands ouverts, effrayés.

C'était étrange. Mais elle devait bien l'admettre, c'était agréable. Terriblement agréable et grisant. Elle ne se souvenait pas avoir jamais ressentit pareils sentiments.

A ce moment là, elle n'était plus sous l'influence de son éducation, de son nom. Seulement sous celle d'un sentiment qu'elle venait de découvrir et auquel elle n'aurait pas su donner de nom.

Ses doigts s'emmêlèrent dans les cheveux de Jacen, tout comme elle-même s'emmêlait dans l'océan de sentiments qui l'entourait.

(j'en verse une larme! )

(et moi alors ^^ )

Le bonheur le plus complet. Aucun autre sentiment parasite. Et même s'il y en avait eu, il n'auraient pas pu éclipser celui-là.

L'amour.

Une chose nouvelle.

Mais tellement agréable.

Jacen ne parvenait pas à lâcher le visage d'Alzaëlle. Il ne le voulais pas. Il voulais que cet instant dure une éternité.

Ne penser à rien d'autre que cet instant magique. Le mémoriser jusqu'au plus profond de lui-même.

Envolés les pensées noires, sombres, tristes.

Ses doigts se perdaient dans les longs cheveux d'ébène de la jeune fille si douce. Un contraste radical avec le sol si dur sur lequel ils étaient encore à genoux.

Le champ de sensations, d'émotions, de perception de Jacen étaient limités à Alzaëlle. Pas plus loin.

Jacen eu alors l'impression de manquer d'air.

Respirer... il l'avais presque oublié, tant ces sensations étaient enivrantes. Il relâcha à contrecœur Alzaëlle, et pris une grande inspiration, lente, calme.

Il se sentait en paix.

Combien de temps étaient-t-ils restés là, l'un contre l'autre ? Plusieurs minutes, probablement. Des minutes qui avaient paru durer des heures et qui maintenant semblaient courtes...

Il contempla encore une fois Alzaëlle. Elle était vraiment très belle...

Jacen souriait. Pas besoin de mots. Leurs regards suffisaient.

Leurs regards.

Celui d'Alzaëlle avait changé et, déjà, des larmes embuaient ses yeux d'encre. Elle ne se souvenait pas avoir autant pleuré en si peu de temps, avoir jamais éprouvé autant de choses en moins de 24 heures.

Une larme coula.

La jeune fille avait du mal à tout comprendre; mais après tout, il n'y avait rien à comprendre. Elle avait du mal à soutenir le regard de Jacen et préféra s'enfoncer dans ses bras, son visage enfoui contre sa poitrine, ses mains désespérément accrochées à ses vêtements.

Elle aurait voulu arrêter de vivre maintenant, persuadée qu'après ce qui venait d'arriver, elle ne pourrait plus jamais rien ressentir d'identique, qu'elle avait connu quelque chose qui ne pouvait être égalé.

Elle pleurait, sentait son coeur battre d'une manière qu'elle n'aurait jamais crue possible et celui de Jacen aussi, quelques centimètres de peau derrière son visage.

Que lui arrivait-il?

Pourquoi les évènements s'enchaînaient ainsi?

Les questions auxquelles elle n'avait et n'aurait probablement jamais de réponses étaient trop nombreuses et lui donnaient le tournis.

Elle préférait rester dans les bras de Jacen.

Alzaëlle ne comprenait rien à ce qui se passait, à ce qu'elle ressentait mais une chose était sûre: après cela, elle ne serait jamais plus comme avant.

Un instant la jeune fille égocentrique, moqueuse, sembla lui faire face.

Puis ce masque dû à l'éducation des Heardarken acheva de disparaitre. Il éclata dans le silence le plus complet.

Une larme scintilla sur le visage d'Alzaëlle.

Puis elle se jeta contre lui, se blottissant dans ses bras.

Alzaëlle était effondrée, les émotion la dépassant totalement. Elle n'avait plus le contrôle absolu d'elle même, c'était à présent ses sentiments qui la guidaient. Et ces sentiments avaient fait un choix.

Elle avait un coeur, comme lui. Pas une pierre foide, dure, hermétique. Et ce coeur ressentait des émotion qui lui étaient inconnues jusqu'à présent. Il naissait enfin, après des années de ténèbres.

Elle n'avait plus besoin de réconfort.

Elle avait besoin d'affection.

Elle avait besoin d'amour.

Jacen ressera ses bras autour du corps de la jeune fille, lentement, délicatement.

Elle avait besoin de douceur.

De longues minutes s'écoulèrent ainsi, rythmées par des sanglots et des battements de coeur sourds, comme autant de sentiment emmêlés, intraduisibles tellement ils étaient forts.

Alzaëlle s'en rendait maintenant compte: sa vie avait été excessivement pauvre en sentiments, et surtout en sentiments tendres, doux.

Elle sentait les bras de Jacen autour de son corps, elle sentait qu'elle n'était pas seule, qu'elle n'était plus seule.

Les yeux fermés, la tête enfouie contre la poitrine de son camarade; ses doigts toujours serrés, accrochés à ses vêtements; à cet instant, Alzaëlle était tout simplement une enfant normale, en proie à des sentiments trop violents.

Enfin, comme après une éternité passée trop vite, la jeune fille releva la tête et ses yeux d'encre encadrés de longs cils de jais dans lesquels perlaient encore quelques larmes plongèrent dans ceux de Jacen.

Elle sentit ses joues se colorer, ses lèvres trembler légèrement.

Mais elle sourit.

Un sourire vrai, presque timide et un peu triste qui véhiculait toutes les émotions; tous les sentiments qui se battaient, qui s'entre-déchiraient dans l'esprit mais aussi dans le coeur de la jeune fille.

Il y avait 24 heures, elle découvrait l'amitié, la véritable amitié.

A présent, elle découvrait l'amour.

Elle n'avait jamais cru ce sentiment réel; tout juste était-ce une idiotie de plus pour bercer et ravir les idiots.

Hier encore, elle en était persuadée.

Ses parents ne s'aimaient pas, inconsciemment - et consciemment sans doute - Alzaëlle le savait. C'était leur passion, leur désir de pouvoir et leurs origines qui les avaient réunis.

Rien d'autre.

Mais ce qu'elle ressentait là, c'était trop fort, trop doux, mais surtout trop brutal et brutalement agréable.

C'était ça l'amour?

Le temps s'écoula encore, seules les respirations lente des deux jeunes serpentard ponctuant l'athmosphère.

Lentement, Alzaëlle releva la tête.

Elle souriait ! C'était tellement rare... Mais maintenant, quelque chose lui disait qu'elle serait bien plus souvent ainsi.

Rayonnante.

Magnifique.

Sublime.

Aucun adjectif ne semblait assez fort pour décrire Alzaëlle. Elle était... belle. Ces simple mot était le plus juste. Tout autre ne pouvais refléter la personne qui se trouvait devant lui.

Celà faisait au moins un bon quart d'heure qu'il étaient dans la salle secrète. Jacen réalisa qu'une fois sortis de là, Alzaëlle devrait faire son possible pour maintenir l'apparence froide et impassible d'une Heardarken. Car à présent, elle semblait définitivement changée. Il lui avait fallu découvrir un nouveau sentiment pour briser le masque.

Mais c'était fait.

Jacen se remit sur pied, les genoux douleureux d'être tant resté appuyé sur le sol dur et froid.

Il tendis la main à Alzaëlle et l'aida à se relever. Il étirèrent leur membres engourdis par l'immobilisme, puis Jacen se rapprocha d'Alzaëlle, et brisa le silence qui s'était installé depuis qu'il avait ouvert l'armoire.

D'une voix qui se voulait assurée, il dit :

«Il faudrait peut-être aller dans la grande salle... le repas doit déjà avoir commencé.»

Jacen avait d'habitude une notion assez précise du temps, mais à ce moment, il lui semblait avoir été tout simplement déconnecté du monde réel.

Le contact de la main de la jeune fille lui rappella qu'il était bien en pleine réalité. Il lui souris à nouveau. Chose simple, pour sentiment compliqué.

Une réalité qui s'annonçait déjà beaucoups moins dure à supporter...

La main dans la main, les doigts emmêlés, tout comme ce qui venait de se produire était étourdissant, incroyable, incompréhensible; Alzaëlle hocha doucement la tête.

Combien de temps s'était-il écoulé depuis qu'ils étaient là, tous les deux? La jeune fille aurait été bien incapable de le dire.

L'évocation du monde extérieur l'effrayait un peu, maintenant que le masque était tombé, avait été détruit.

Comment résisterait-elle aux autres à présent?

Cette armure de détestable héritière des Heardarken qui lui avait servi de peau jusqu'ici venait d'être détruite.

C'était terrifiant.

Elle aurait voulu que tout s'arrête maintenant, que la mort ou la folie s'empare d'elle pour ne pas avoir à subir le monde extérieur.

Pour ne pas se retrouver à nouveau avec...

Les autres.

Heureusement, Jacen était là.

Son camarade avait quelque-chose de profondément rassurant mais déjà, Alzaëlle ne savait quoi penser de ce qui venait d'arriver.

Elle recommençait à trop réfléchir, à revenir trop en arrière.

L'influence des Heardarken ne se balayait pas ainsi, en quelques 24 heures.

Ou pas totalement.

Jacen décelà une trace d'inquiétude sur le visage de la jeune fille. Les émotions d'Alzaëlle étaient trop visibles...

Mais il l'aiderait. Auparavant elle était seule. C'est pour celà qu'elle était renfermée et insolente. Maintenant que Jacen était à ses côtés... elle n'avait plus autant besoin de son manteau d'arrogance.

«On y va.»

Ils prirent la direction de la grande salle, afin de soulager un peu leur ventre vide.

Si l'on disait que les émotions creusaient, après ces derniers instants, ils devaient avoir un gouffre à la place du ventre...